28.05.2024
N°1 2024

Participation numérique de personnes handicapées à la formation (continue) professionnelle

Cet article présente les résultats d’une enquête nationale auprès des organisations de formation continue et professionnelle. Elle a été menée dans le cadre du projet de recherche PNR 77 «Participation numérique de personnes handicapées à la formation professionnelle». L’article offre tout d’abord un aperçu actuel de la participation numérique dans les institutions de formation professionnelle et continue en Suisse. Il est particulièrement intéressant de savoir quels domaines de la formation (continue) professionnelle présentent des opportunités et des défis spécifiques  pour la participation numérique des personnes handicapées. Cet article s’intéresse ensuite aux facteurs qui influencent la participation numérique des personnes handicapées dans la formation professionnelle et continue en Suisse.

1. Introduction

L’utilisation des technologies numériques1 a entraîné des modifications radicales pour les organisations de formation continue et professionnelle, la conception de l’enseignement et la prise en charge des apprenantes et apprenants. Des études montrent que ces technologies facilitent l’accès à l’apprentissage tout au long de la vie, l’accès à la qualification, et donc l’accès au monde du travail (Ministère fédéral du travail et des affaires sociales, 2016; Hümbelin et al., 2019). En principe, ces potentiels existent aussi pour les apprenantes et apprenants avec un handicap. Toutefois, on ne peut pas partir du principe que la simple présence des technologies numériques dans les organisations de formation professionnelle et continue soit suffisante pour garantir la participation numérique2. Même si beaucoup de choses ont déjà été accomplies pour développer des offres de formation inclusives, la recherche professionnelle et universitaire ne s’intéresse que sporadiquement au thème du handicap et de l’exclusion des personnes handicapées, qu’elles soient enseignantes ou apprenantes (Corby et al., 2012; Klein & Schindler, 2016). Sur ce point, l’étude de Kobi & Pärli (2010) est particulièrement pertinente pour la Suisse. Elle montre que de nombreux obstacles compliquent la participation égalitaire à la formation universitaire des étudiantes et étudiants avec un handicap. Les obstacles dans le domaine des technologies numériques n’ont pas été traités séparément dans l’étude, à l’exception des sites Internet.

Les éléments numériques font de plus en plus partie des concepts de la formation professionnelle, et donc du quotidien de la formation professionnelle. Ainsi, les établissements de formation développent des offres numériques en complément de leurs cours en présentiel pour répondre aux besoins des participantes et participants, ainsi que pour acquérir de nouveaux groupes cibles (Rohs, 2016; Weber, 2018). Seale et al. (2010) observent une tendance qui consiste à considérer «l’inclusion numérique au sein de la formation universitaire [...] exclusivement sous l’angle de l’accessibilité». Papadopoulos (2012) parvient donc à la conclusion qu’une participation globale à des offres de formation (continue) exige que des conditions techniques et organisationnelles soient réunies. Il est donc nécessaire d’analyser la participation numérique dans les établissements de formation professionnelle et continue au moyen d’un concept qui prend en compte différents aspects organisationnels.

Un tel concept a été présenté par Booth et Ainscow (2010), avec l’indice d’inclusion qui distingue trois aspects organisationnels: les cultures, les structures et les pratiques. L’aspect des cultures comprend notamment les attitudes et les valeurs inclusives du personnel d’un établissement de formation. Les structures inclusives englobent par exemple les offres de soutien destinées aux personnes avec un handicap, le personnel enseignant tout comme les apprenantes et apprenants, les concepts et les stratégies pour l’inclusion ainsi que les mesures visant à garantir l’accessibilité. L’aspect des pratiques inclut quant à lui l’implication active des apprenantes et apprenants au processus de formation, la possibilité d’un apprentissage coopératif ainsi que le développement et l’utilisation commune de ressources matérielles inclusives. En revanche, jusqu’à présent, les thèmes de la numérisation et de la participation numérique sont encore très peu pris en compte dans l’actuel indice d’inclusion.

2. Méthodologie

2.1. Point de départ et élaboration du questionnaire

Les résultats présentés ici ont été recueillis dans le cadre du projet en cours PNR 77 «Participation numérique de personnes handicapées à la formation professionnelle». De juin à octobre 2022, une enquête en ligne a été effectuée dans trois langues auprès des organisations de formation continue et professionnelle en Suisse. Parmi les organisations sondées figuraient des établissements du degré secondaire II (établissements de la formation initiale générale et professionnelle) et du degré tertiaire (écoles supérieures, hautes écoles spécialisées et hautes écoles pédagogiques) ainsi que des établissements de formation continue. Comme il n’existe actuellement aucun instrument permettant de saisir le statu quo de la participation numérique dans le contexte de la formation (continue) professionnelle, un instrument a été développé à cet effet. Lors de l’élaboration du questionnaire de l’enquête, nous avons utilisé l’indice d’inclusion développé par Booth et Ainscow (2000) pour soutenir les établissements dans l’aménagement de l’inclusion au sein de leur organisation. Cet indice a été développé par l’autrice et l’auteur en collaboration avec des expertes et experts, des enseignantes et enseignants, des directrices et directeurs d’école. En adaptant le dimensionnement de l’inclusion selon Booth et Ainscow dans les aspects cultures, structures et pratiques, notre objectif était de dresser un état des lieux le plus complet possible de la participation numérique des apprenantes et apprenants avec un handicap dans le contexte de la formation initiale et continue professionnelle. Étant donné que l’indice ne prend en compte aucun aspect en lien avec les technologies numériques, des éléments à ce sujet, pertinents pour la participation des personnes handicapées, ont été développés sur la base de recherches complètes dans la littérature spécialisée et des enseignements issus de la première partie qualitative de l’étude (cf. Ackermann et al., 2022; Kaiser et al., 2023).

2.2 Récolte de données et description de l’échantillon

Dans le cadre de l’enquête, nous avons recueilli auprès de 431 collaboratrices et collaborateurs issu·e·s de 289 établissements des évaluations complètes sur les thèmes de la numérisation, de la participation numérique des personnes handicapées et de l’accessibilité numérique. Le taux de réponse est d’environ 23 %. Les établissements de formation professionnelle classiques sont les organisations les plus représentées dans l’échantillon (un peu plus d’un tiers). Les établissements de formation professionnelle spécialisés pour personnes handicapées composent un quart de l’échantillon. S’agissant des hautes écoles spécialisées et des écoles supérieures, elles constituent respectivement 17 % et 13 % de l’échantillon. Quant aux établissements de formation continue, ils forment 7 % de l’échantillon, contre 3 % pour les hautes écoles pédagogiques, qui sont les moins représentées.

Un peu plus de la moitié des collaboratrices et collaborateurs interrogé·e·s assument la fonction de directrice (suppléante) ou directeur (suppléant) dans l’organisation. Environ un tiers des collaboratrices et collaborateurs exercent une activité d’enseignement et/ou sont responsables de la coordination de la formation. Les personnes qui travaillent dans le domaine de la coordination de la formation continue représentent 14 % de l’échantillon. Environ une collaboratrice ou un collaborateur interrogé·e sur dix occupe un poste dans le domaine de l’apprentissage numérique/e-learning, de la diversité et/ou traite des questions en lien avec les personnes handicapées. Une personne interrogée sur vingt exerce une activité dans le secteur informatique.

3. Résultats

3.1 Structures de la participation numérique

Ce chapitre présente les résultats de la participation numérique qui relèvent de l’aspect structures. Dans la plupart des établissements de formation interrogés, le quotidien de la formation est déjà largement numérisé. Cela se reflète aussi dans les formes d’utilisation des technologies numériques dans l’enseignement. Seul un établissement sur dix propose (encore) majoritairement un enseignement magistral traditionnel, où les technologies sont relativement absentes. En vue de l’évaluation, différentes affirmations ont été soumises aux établissements interrogés. Elles permettent de tirer des conclusions sur l’accessibilité numérique de leurs offres de formation (cf. fig. 1).

La fig. 1 montre que seule une petite partie des organisations met à la disposition des apprenantes et apprenants des films sous-titrés, des supports didactiques avec des informations visuelles dotées d’un texte alternatif ou des enregistrements des cours. Nous voulions également savoir comment les organisations garantissent l’accessibilité aux contenus didactiques. Tandis que 16 % des organisations interrogées prennent très peu de mesures pour garantir un tel accès, une organisation sur cinq s’efforce de garantir le design universel et tente, selon les indications des spécialistes, de rendre accessibles tous les contenus didactiques pour les apprenantes et apprenants. La majorité des organisations interrogées (64 %) veille à garantir l’accessibilité aux contenus didactiques uniquement en cas de nécessité, une tâche qui, dans huit organisations sur dix, relève de la responsabilité du personnel enseignant.

Dans ce contexte, nous avons cherché à découvrir, dans le cadre de cette enquête, si la création de contenus didactiques accessibles entraînait une charge de travail supplémentaire pour le personnel enseignant. Ainsi, 97 % des organisations interrogées ont indiqué que la création de contenus didactiques accessibles occasionne une charge de travail supplémentaire pour les enseignantes et enseignants. Environ les trois quarts des personnes interrogées constatent que le thème de l’accessibilité représente un défi pour le personnel enseignant.

Nous souhaitions également savoir si les organisations interrogées disposaient de concepts pour les différents thèmes pertinents relevant de la participation numérique. Alors que la majorité des organisations interrogées (un peu plus des deux tiers) dispose de documents conceptuels sur le thème de la numérisation, les documents concernant l’inclusion (49 %), l’éducation ou la formation pour les personnes handicapées (40 %) et l’accessibilité (39 %) sont beaucoup moins répandus dans les organisations interrogées. Un constat est intéressant: seule une organisation interrogée sur trois aborde les questions spécifiques au handicap (p. ex. l’accessibilité numérique) dans ses documents conceptuels relatifs à la numérisation.

Si l’on examine les thèmes à propos desquels les organisations interrogées ont proposé, ces trois dernières années, des formations à l’intention de leurs collaboratrices et collaborateurs, on constate que l’utilisation des moyens numériques est de loin le thème le plus souvent abordé dans les formations (90 %). Alors qu’environ deux cinquièmes des organisations ont proposé des formations sur les thèmes de la compensation des désavantages et de la diversité dans le contexte de l’éducation, les thèmes de l’éducation et de la formation pour les personnes handicapées et de l’accessibilité numérique (p. ex. conception de documents accessibles) font l’objet de formations dans un peu moins d’un tiers des organisations interrogées.

Nous avons également demandé aux personnes interrogées si leurs organisations disposaient d’interlocutrices ou d’interlocuteurs ou de points de contact pour les aspects spécifiques au handicap et pour les questions en lien avec l’accessibilité numérique. La majorité des organisations interrogées (à peu près les trois quarts) dispose d’une personne ou d’un point de contact dédié aux aspects spécifiques au handicap. Un peu moins de la moitié dispose de telles interlocutrices ou interlocuteurs pour les questions en lien avec l’accessibilité numérique.

3.2 Pratiques de la participation numérique

Ce chapitre présente les résultats de la participation numérique en lien avec l’aspect des pratiques. Nous avons tout d’abord cherché à savoir comment les directions des organisations gèrent les aspects en lien avec l’inclusion. Les évaluations des collaboratrices et collaborateurs sur ce point sont très clairement positives (cf. fig. 2). Il faut cependant prendre en compte le fait qu’environ la moitié des personnes interrogées sont des directrices ou directeurs des organisations, et que les collaboratrices et collaborateurs sans fonction de direction se montrent nettement plus critiques à cet égard que les personnes exerçant une fonction de direction.

L’évaluation des personnes interrogées sur la question de savoir si le personnel enseignant dispose des connaissances requises pour dispenser un enseignement inclusif est légèrement favorable. Près de la moitié des organisations n’est plutôt pas d’accord ou pas du tout d’accord avec cette affirmation. Les réponses à la question de savoir si le personnel enseignant est en mesure de concevoir une offre de formation permettant aux apprenantes et apprenants avec un handicap d’y participer sont nettement plus critiques. La majorité des établissements estime que cela n’est pas le cas. Par ailleurs, nous avons demandé aux collaboratrices et collaborateurs si la mise en œuvre des dispositions de la CNUDPH (la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées) était un thème régulièrement abordé au sein de l’organisation. Tel est le cas dans seulement un cinquième des organisations interrogées.

Nous avons également souhaité savoir si les organisations mettaient à la disposition du personnel enseignant des supports d’information pour la création et la conception de contenus didactiques accessibles. Il ressort que 44 % des organisations interrogées mettent de tels supports à la disposition de leur personnel enseignant. Il est intéressant de noter qu’environ un quart des personnes interrogées ignore si de tels supports sont disponibles dans leur organisation, alors même que ces personnes sont assez souvent amenées à traiter le thème de l’accessibilité.

3.3. Cultures de la participation numérique

Dans le cadre de l’aspect «cultures», nous avons d’abord recueilli les évaluations sur l’attitude générale des collaboratrices et collaborateurs vis-à-vis de l’inclusion des personnes handicapées (cf. fig. 3). Nous souhaitions connaître l’importance accordée à l’inclusion des personnes handicapées dans les établissements des personnes interrogées. Une grande majorité estime que ce thème revêt une importance majeure dans leur établissement. Les collaboratrices et collaborateurs avec ou sans fonction de direction sont, dans une large mesure, d’accord sur ce point. Par contre, ces personnes sont beaucoup moins nombreuses à être d’avis que le thème de l’accessibilité numérique occupe une place importante dans leur établissement: un peu plus de la moitié des établissements réfute cette affirmation. Dans quelques établissements seulement, les personnes interrogées jugent que les collaboratrices et collaborateurs se montrent critiques vis-à-vis du thème de l’inclusion des apprenantes et apprenants avec un handicap. Ces résultats montrent que, de manière générale, les organisations ont une attitude ouverte vis-à-vis de l’inclusion des apprenantes et apprenants avec un handicap, mais qu’elles sont beaucoup moins nombreuses à prioriser des thèmes comme l’accessibilité numérique ou l’accessibilité de manière générale.

3.4. Localisation des organisations dans les trois dimensions de la participation numérique

Comme il n’existait pas encore d’instrument valable pour mesurer la mise en œuvre de la participation numérique dans les établissements de la formation initiale et continue professionnelle, l’analyse ci-après représente une tentative exploratoire visant à déterminer le potentiel d’utilisation de l’indice d’inclusion pour évaluer la mise en œuvre de la participation numérique dans les établissements de la formation initiale et continue professionnelle. Pour ce faire, nous avons procédé comme suit: dans un premier temps, des analyses en composantes principales non linéaires (ACPNL) ont été effectuées afin d’identifier des éléments appropriés pour décrire les aspects «structures», «pratiques» et «cultures» de la participation numérique. L’ACPNL est une méthode adaptée pour identifier, dans des données, des facteurs contenant des variables ordinales et nominales (Linting & van der Kooij, 2012). Dans un deuxième temps, nous avons testé avec la méthode ACPNL si les trois aspects susmentionnés pouvaient être réduits à un aspect susceptible d’être compris comme étant la participation numérique. Dans une troisième étape, nous avons procédé à d’autres analyses avec ces aspects, notamment une analyse en cluster.

Analyse en composantes principales non linéaire des aspects de l’indice d’inclusion

La figure 4 montre la méthode et les valeurs caractéristiques statistiques utilisées pour l’ACPNL appliquée aux aspects de l’indice d’inclusion dans la mise en œuvre de la participation numérique au sein des établissements de la formation initiale et continue professionnelle. Presque tous les éléments pris en compte sont contenus dans les réponses de seulement une partie des personnes interrogées (qui disposent des connaissances à ce sujet dans leur organisation). Par conséquent, l’échantillon utilisé pour les étapes d’analyse suivantes se limite à n = 45. Cela restreint les possibilités de désagrégation supplémentaire de l’échantillon. L’analyse a permis d’obtenir des résultats d’une qualité moyenne à bonne. Cela signifie que les évaluations recueillies sur les aspects «structures», «pratiques» et «cultures» de la participation numérique reflètent de manière satisfaisante le degré de mise en œuvre de cette thématique dans les organisations.

Ci-après, les organisations ont été classées sur la base de leurs caractéristiques dans les différents aspects au moyen d’une analyse en cluster K-Means. Celle-ci a permis d’identifier deux groupes. Après une étude plus approfondie, ces deux groupes peuvent être décrits, sur le plan de la participation numérique, comme des organisations hautement développées (n=27) et peu développées (n=18). Les organisations hautement développées sont celles qui, par rapport aux organisations moins développées, se distinguent particulièrement dans les aspects «pratiques» et «cultures» et, dans une moindre mesure, dans l’aspect «structures». Cela signifie que les structures de la participation numérique (p. ex. sous-titres, formation continue, concepts) présentent un niveau de développement similaire dans les organisations. En revanche, des différences plus marquées existent au niveau des pratiques et des cultures de la participation numérique. La figure 5 montre un aperçu des diagrammes de dispersion, avec les affectations par groupe dans les trois aspects.

Il serait intéressant d’étudier l’appartenance aux clusters selon le type d’organisation. Cependant, la désagrégation jusqu’aux types d’organisation aboutit à un nombre très faible de cas et ceux-ci ne peuvent plus être traités au moyen de l’inférence statistique. Par conséquent, aucune comparaison par type d’organisation n’est présentée ici.

4. Discussion

Les technologies numériques modifient de manière radicale les organisations de formation continue et professionnelle, leurs infrastructures, les formes d’enseignement ainsi que les prestations de soutien pour les apprenantes et apprenants. Ces technologies ont le potentiel de faciliter l’accessibilité aux contenus de formation et aux prestations de soutien. Pourtant, leur mise en œuvre n’améliore pas automatiquement leur accessibilité. Les résultats de la partie quantitative du projet PNR 77 «Participation numérique de personnes handicapées à la formation professionnelle» montrent clairement que l’accessibilité numérique et, plus largement, la participation numérique des apprenantes et apprenants avec un handicap sont encore peu développées dans une partie des organisations de formation continue et professionnelle en Suisse. Bien que les établissements interrogés attachent une grande importance au thème de la numérisation et qu’elles disposent, dans une large mesure, d’une infrastructure numérique pour les processus de communication et d’information, on constate des disparités notables entre les organisations dans l’aménagement de la participation numérique dans les aspects «structures», «pratiques» et «cultures». Ces résultats soulèvent une question fondamentale, à savoir si cette situation entraîne des désavantages supplémentaires pour les personnes handicapées dans les organisations de formation continue et professionnelle en Suisse.

Concernant l’aspect structurel, on constate que les technologies numériques susceptibles d’améliorer la participation des personnes handicapées (p. ex. boucles auditives, sous-titres) sont souvent absentes dans les institutions de formation continue et professionnelle. En outre, peu d’organisations s’efforcent de garantir une conception intégrale selon les principes du design universel. En général, des contenus didactiques accessibles ne sont proposés que sur demande. La plupart des personnes interrogées estime que la préparation de tels contenus implique une charge de travail élevée pour le personnel enseignant. Ce constat est préoccupant car il suggère que l’accessibilité numérique relève généralement de la responsabilité des enseignantes et enseignants, pour lesquels cette tâche, le plus souvent non soutenue par l’organisation, implique une charge de travail supplémentaire.

Les concepts forment une base importante pour le développement culturel et l’action professionnelle dans les organisations de formation (Bell & Stevenson, 2006). Au regard des résultats présentés ici, il n’est pas surprenant de constater que les concepts relatifs à l’accessibilité numérique sont présents dans seulement une partie des organisations. Même si les personnes interrogées jugent les thèmes de l’inclusion et de la participation numérique très importants pour les organisations, cela se reflète étonnamment peu dans les infrastructures et les concepts des organisations. En conséquence, les organisations interrogées considèrent que les pratiques d’enseignement sont plutôt peu inclusives et que le niveau de connaissances du personnel enseignant à propos de l’enseignement accessible est faible.

Globalement, les résultats exposés dans cet article montrent que, si l’inclusion des personnes handicapées dans les organisations de formation continue et professionnelle doit être durablement renforcée et si l’on veut lutter contre l’exclusion de ces personnes, il convient d’identifier et d’aborder à la fois les potentiels des technologies numériques et les obstacles à leur utilisation pour l’apprentissage et la participation, et ce dans tous les aspects cités par Booth et Ainscow (2000). De manière générale, les organisations de formation continue et professionnelle en Suisse peuvent s’appuyer sur une infrastructure numérique bien développée. Il y a donc en la matière des potentiels à exploiter, qui exigent en outre peu de ressources. Des investissements semblent pertinents notamment dans le domaine des pratiques organisationnelles, p. ex. dans le développement des compétences du personnel enseignant, et dans la culture de l’organisation, au sens d’un développement des attitudes.

  1. Ici, les technologies numériques désignent tous les systèmes électroniques qui fonctionnent au moyen d’un code binaire [3]. En font notamment partie les technologies Internet, les terminaux numériques, les objets connectés, les robots et les applications logicielles.
  2. Dans les chapitres suivants, nous utilisons les termes «e-inclusion» et «participation numérique» comme synonymes.

Bibliographie

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Olivier Steiner, professeur dans le domaine des situations et modes de vie des bénéficiaires de l’aide à l’enfance et à la jeunesse, Haute école pour le travail social de la FHNW. Contact: olivier.steiner@fhnw.ch

Fabienne Kaiser, collaboratrice scientifique, Haute école pour le travail social de la FHNW. Contact: fabienne.kaiser@fhnw.ch